Musicalement... musicalement, je dirais pour moi que Nirvana était fort, car Cobain n'était pas un guitariste du tonnerre (bah ouais, le punkrock et le grunge sont pas basés sur des accords difficiles : c'est le "do it yourself" : tu sais jouer trois accords de m.rde avec ta guitare ? félicitations, tu es punk!), mais un super songwritter car ses chansons étaient pleine d'émotion : Nirvana faisait de la musique qui n'était pas en toc, à tel point que les radios ne connaissent que Nevermind, car In Utero et Bleach n'étaient pas assez propre à leur gout, et que leur son ne pouvait pas passer à la radio...
Et surtout, Cobain avait le génie de composer des chansons de punkrock taillées dans le marbre, ca ne s'explique pas, c'est un don : poète du malêtre, il arrivait à poser les sentiments du spleen de Baudelaire dans une chanson, et à créer en même temps une chanson de rock pure et dure, bien lourde, bien sale, qui donne envie de prendre une guitare, de taper des riffs et de fracasser la dite guitare par terre ensuite. Cobain est un type inculte, venant d’un bled minable et sa vie est un fiasco. Il se sent merdique, son équilibre émotionnel et physique se barre en couille depuis trop longtemps. Son seul talent réside dans sa faculté à écrire des chansons de punk rock parfaites. Il est le John Lennon du punk rock. C’est un don, un truc qui ne s’explique pas. Il a le génie de composer et de chanter comme d’autres sont doués pour la mécanique, le pilotage ou la sculpture sur glace. Quand il gagne son premier million de dollars, il passe en quelques jours de statut de musicien punk rock dormant à même le matelas dans un trou à rats de Seattle à celui de superstar mondialement connue. Il devient l’icône d’une génération, le poète du mal-être, le chantre du spleen existentialiste et de la déglingue. Et là, il se met à vivre le truc intensément, à la manière d’un Sid Vicious du grunge multimillionnaire. Il peut se permettre tout, tout se payer, envoyer ch.er qui il veut quand il veut et il ne s’en prive pas. Contre toute attente, il est devenu quelqu’un.
« On aura échappé à ça. », disait la légende d’un dessin de Pierre La Police paru dans les Inrockuptibles quelques temps après le suicide de Kurt Cobain : le dessin représentait Cobain -vieux, bedonnant et moche- vêtu d’une chemise à fleur affalé sur un transat au bord de la piscine d’une luxueuse villa californienne, sirotant un cocktail. Cobain n’a pas eu le temps de vieillir, de devenir une caricature de rock star à la Mick Jagger, ne nous a pas offert le spectacle d’un quinquagénaire collectionneur d’art moderne, ne sortant de son manoir à 5 millions de dollars que pour remettre un oscar ou un MTV award. Avant de s’effacer, Cobain et son groupe nous auront laissé trois grands disques de punk rock et offert une poignée de concerts mémorables à ses fans...
RIP